Droit de rétractation SRU : conditions, délais et formes pour l’acquéreur non professionnel
Lorsqu’un particulier signe un compromis ou une promesse de vente pour l’acquisition d’un logement, il bénéficie d’un droit de rétractation prévu par la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbains). Mais comment ce droit s’exerce-t-il concrètement ? Quels en sont les délais, les modalités et les éventuelles exceptions ? Faisons le point complet à la lumière des règles en vigueur et de la jurisprudence récente.
🏠 À qui s’applique le droit de rétractation SRU ?
Ce droit est accordé à tout acquéreur non professionnel, c’est-à-dire un particulier qui achète un logement à usage d’habitation, qu’il s’agisse d’un bien neuf ou ancien, d’une maison ou d’un appartement.
Il est inscrit à l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation (CCH). Ce droit est d’ordre public : cela signifie qu’il ne peut être écarté, ni réduit, même avec l’accord des deux parties. Une décision récente de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence (15 mai 2024, RG 20/06836) est venue rappeler cette protection essentielle pour les acquéreurs.

✉️ Quelle notification pour faire courir le délai de rétractation ?
Le point de départ du délai de rétractation dépend de la manière dont le compromis est notifié à l’acquéreur. La loi encadre strictement cette notification :
• Le compromis de vente peut être transmis par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR).
• Il peut aussi être notifié par un acte d’huissier (désormais appelé « commissaire de justice »).
• Enfin, il peut être remis en main propre par un agent immobilier mandaté par le vendeur, à condition de respecter certaines mentions légales.
Dans ce dernier cas, la remise doit impérativement s’accompagner d’une mention manuscrite de l’acquéreur, conforme à l’article D 271-6 du CCH. À défaut, l’agent immobilier s’expose à une amende pouvant aller jusqu’à 15 000 €, notamment si les modalités du droit de rétractation ne sont pas clairement indiquées (C. consommation, art. L 511-7).
🔎 En pratique : une notification mal faite peut rendre le délai de rétractation inopposable, voire invalider la vente.
📝 Comment l’acquéreur peut-il exercer son droit de rétractation ?
Pour se rétracter, l’acquéreur dispose de plusieurs moyens juridiquement reconnus :
• Il peut envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR).
• Il peut également recourir à un commissaire de justice pour notifier sa décision.
• Depuis 2022, une décision de la Cour de cassation (3e civ., 2 février 2022, n° 20-23468) a reconnu, dans un cas particulier, la validité d’un courriel envoyé au notaire via l’agent immobilier.
⚠️ Attention cependant : ce dernier mode (l’e-mail) n’a pas encore valeur de règle générale. Il reste une exception, appréciée au cas par cas. Il est donc recommandé de privilégier les modes « sûrs », comme la LRAR, pour éviter toute contestation ultérieure.
⏳ Quel est le délai de rétractation SRU ?
Le délai est clair : 10 jours calendaires, à compter du lendemain de la première présentation de la lettre recommandée notifiant le compromis.
Il est important de noter que le retrait effectif du courrier n’est pas nécessaire : dès lors que le facteur présente la lettre, le délai commence à courir, même si l’acquéreur ne va pas chercher le pli. C’est ce qu’a confirmé la Cour de cassation dans un arrêt du 5 décembre 2007 (n° 06-19567).
📌 Exemple concret :
Un acquéreur pensait que le délai ne commençait qu’à partir du jour où il avait effectivement récupéré la lettre. Il s’est vu débouté de sa rétractation, et condamné à 3 500 € de dommages pour n’avoir pas respecté le délai légal (CA Douai, 1er décembre 2022, RG 20/04446).
💡 Bon à savoir : si le délai expire un samedi, dimanche ou jour férié, il est automatiquement prolongé jusqu’au jour ouvrable suivant, conformément à l’article 642 du Code de procédure civile.
📚 Lors d'une vente en copropriété
Dans le cadre d’une vente d’un lot de copropriété, le compromis doit être remis à l’acquéreur au plus tard le jour de la signature. Il doit également contenir l’ensemble des documents obligatoires liés à la copropriété (règlement, diagnostics, procès-verbaux d’AG, etc.).
⚠️ Si ces documents ne sont pas fournis, le délai de rétractation ne court pas, ce qui peut entraîner une remise en cause de la validité du processus de vente.
✔️ À retenir
• L’acquéreur non professionnel dispose d’un droit de rétractation de 10 jours, à compter du lendemain de la notification régulière du compromis.
• Ce droit peut être exercé par LRAR, acte de commissaire de justice, ou dans certains cas exceptionnels, par email (mais cela reste incertain).
• La notification doit être conforme, notamment si elle est remise en main propre par un professionnel.
• En copropriété, l’ensemble des documents doit être transmis avec le compromis, sans quoi le délai ne commence pas à courir.